Les blanchiments du chocolat : les comprendre pour trouver les solutions adaptées

2 Mai, 2025 | Blog

Le chocolat est soumis à des altérations qui dégradent son aspect visuel et gustatif. Les détériorations les plus courantes sont le blanchiment sucré et le blanchiment gras. Ils peuvent être confondus car ils se caractérisent tous deux par l’apparition d’une pellicule blanchâtre en surface des produits. Mais ils n’ont ni la même origine, ni le même impact sur le produit fini.

Le blanchiment sucré est le résultat de la recristallisation du sucre, alors que le blanchiment gras est lié à la recristallisation du beurre de cacao (matière grasse majoritaire du chocolat). Les solutions envisageables sont donc différentes.

Comment reconnaitre les types de blanchiment ?

Pour pouvoir définir quel type de blanchiment s’est formé sur le produit, il faut toucher sa surface :

  • Si le toucher est râpeux, alors c’est du blanchiment sucrier
  • Si le toucher est gras, alors c’est du blanchiment gras

Dans les deux cas, ils ne détériorent pas la qualité sanitaire des produits finis (pas de risque microbiologique). Mais, ces blanchiments dénaturent l’apparence visuelle des chocolats, ce qui a un impact négatif sur leur perception par le consommateur.

Le blanchiment sucrier

Le blanchiment sucrier est observé lorsque le chocolat est en contact avec l’humidité de l’air. La condensation de l’eau à la surface entraine la dissolution partielle du sucre qui recristallise ensuite de façon irrégulière lorsque les gouttes d’eau sont évaporées. Cela confère au chocolat une couche blanche en surface associée à un toucher râpeux.

Pour éviter ce phénomène, ce sont les conditions de stockage du chocolat qui doivent être modifiées : il faut limiter l’humidité ambiante.

Le blanchiment gras

L’origine du blanchiment gras

Le blanchiment gras est le plus courant, mais aussi, le plus complexe. Il est lié à la cristallisation du beurre de cacao. C’est une matière grasse dite polymorphe, ce qui signifie qu’elle peut cristalliser selon six formes polymorphiques allant de la forme γ (la moins stable) à β (la plus stable), selon l’organisation des triglycérides dans l’espace :

  • La forme α est associée au réseau de type hexagonal. Cet arrangement est plus lâche, notamment en raison d’une diminution des interactions entre les chaînes : c’est la forme la moins stable
  • La forme β est associée au réseau de type orthorhombique avec un arrangement perpendiculaire et une densité de structure intermédiaire
  • La forme β est associée au réseau triclinique parallèle. Elle correspond à la structure la plus dense et la plus stable.

L’ensemble des variétés cristallines peuvent être obtenues à partir de l’état liquide. Cependant, les formes cristallines les plus stables nécessitent des températures de cristallisation plus élevées ainsi que des durées de formations plus longues.

Les transformations polymorphiques à l’état solide mènent uniquement à des variétés cristallines thermodynamiquement plus stables. Et, au cours du temps, les formes polymorphiques vont évoluer pour passer des formes instables (γ, α et β’), vers les formes les plus stables (β).

La forme βV est celle qui est recherchée lors de la formulation d’un produit chocolaté. C’est cette forme cristalline qui confère au produit fini les propriétés de texture souhaitées (brillant et cassant) ainsi qu’un profil de fusion adapté en bouche (28 – 33 °C). C’est le tempérage du chocolat qui permet de sélectionner cette forme βV.

La forme βVI, la plus stable, est obtenue en l’espace de quelques heures à quelques mois lors du vieillissement du chocolat. Comme c’est la forme la plus stable, les cristaux βV vont progressivement et naturellement transitionner vers la forme βVI. Le blanchiment gras du chocolat ne peut donc pas être supprimé, mais il peut être retardé : l’objectif est de ralentir la transition de la forme βV vers βVI.

Le blanchiment gras est visible du fait de la présence de cristaux βVI d’une taille supérieure à 5 µm, qui s’étendent à la surface et diffractent la lumière, ce qui les rend visibles à l’œil nu, comme représenté sur les photos suivantes :

Comparaison de la surface d’un bonbon non blanchi à celle d’un bonbon blanchi (d’après Dahlenborg, 2014).

Le blanchiment gras présente différentes morphologies en fonction des causes responsables de son apparition. En effet, suivant s’il est lié à une exposition à de hautes températures, à une variation de températures ou à un stockage long, le blanchiment sera différent.

Différentes morphologies du blanchiment gras : (A) blanchiment gras dû au stockage à long terme, (B, C, D) dû à une exposition à de hautes températures, (E, F) dû à une exposition à des fluctuations de températures (d’après Sato et al., 2021)

Le blanchiment gras ne représente pas un danger sanitaire et n’altère pas la composition du produit fini. Cependant, ce phénomène mène à des modifications des propriétés sensorielles du chocolat, tel qu’un durcissement du produit, un temps de fonte plus long en bouche, du fait d’une plage de températures de fusion plus élevée pour les cristaux βVI (22 – 27 °C), et une saveur moins intense. L’ensemble de ces modifications mène à une réduction significative de la durée de vie du produit et donc à de nombreuses pertes matérielles et économiques.

Comment limiter le blanchiment gras ?

Le tempérage du chocolat

Le tempérage est une étape essentielle lors de la fabrication des produits chocolatés puisque cette étape permet la sélection des cristaux βV, conférant aux produits les caractéristiques recherchées.

Comparaison de chocolats tempéré et non-tempéré.

Pour cela, le chocolat est fondu à 45 – 50 °C, afin de supprimer l’ensemble des cristaux présents. Puis, le chocolat est refroidi, afin d’induire la cristallisation de l’ensemble des formes cristallines, notamment des formes β’ instables et βV stables. Le chocolat est ensuite, de nouveau, réchauffé à une température supérieure aux points de fusion des cristaux instables afin de les éliminer et d’avoir, au sein du chocolat, uniquement la forme βV recherchée. Enfin, lorsque la température diminue, la cristallisation se déroule selon la forme βV, donnant un chocolat avec les caractéristiques souhaitées.

Exemple de courbe de tempérage du chocolat noir (schéma AGIR)

La maitrise du stockage des produits finis

Si le chocolat est soumis à des températures fluctuantes ou élevées lors du stockage, alors, il y a un risque de provoquer la fonte du beurre de cacao. Et, du fait des plages de températures de fusion étroites entre les différentes formes polymorphiques, même de faibles variations de températures (2-3°C) peuvent induire le blanchiment. A des températures de 32-34°C, le taux de solide diminue et la matière grasse liquide recristallise ensuite de manière incontrôlée. Des températures de stockage supérieures à 18°C peuvent induire le développement du blanchiment gras, comme représenté sur la figure suivante.

Evolution de l’intensité de la cristallisation, du blanchiment et de la migration en fonction de la température de stockage (d’après Ziegleder, 2012)

La maitrise des températures de stockage est donc impérative pour limiter l’apparition du blanchiment du chocolat. Dans l’idéal, le stockage doit se faire entre 15°C et 18°C.

Autres solutions

D’autres solutions sont étudiées pour retarder l’apparition du blanchiment gras du chocolat. C’est notamment le cas du chambrage. Il s’agit d’un traitement thermique appliqué post-production directement sur les produits finis (conditionnés ou non) avant stockage. Il peut s’opérer à basses températures (4 °C, voire négatives) mais est généralement réalisé à hautes températures (25 – 32 °C). Dans tous les cas, le choix du couple temps/température appliqué sur les produits, est fortement dépendant de la composition et du type de produit fini. Cette solution a démontré des résultats positifs, mais son intégration dans les process de fabrication peut être complexe, ce qui limite son utilisation par les professionnels de la filière. Si ce procédé vous intéresse et que vous voulez avoir plus d’informations, contactez-nous.

Conclusion

Le chocolat est une matrice sensible, notamment aux changements de température et à l’humidité. L’apparition des deux types de blanchiment (sucré et gras) peut limiter l’appétence pour le produit fini, mais ne présente pas de danger sanitaire.

Le blanchiment gras est plus complexe à limiter car il est lié à la migration et à la recristallisation du beurre de cacao liquide en surface. Une maitrise de la cristallisation et du procédé de production dans son ensemble (tempérage, stockage…) est impérative pour garantir la qualité des produits finis ainsi que leur durée de vie.

Si vous souhaitez plus d’informations sur la cristallisation du chocolat, les phénomènes de blanchiment ou les solutions envisageables, vous pouvez vous inscrire à notre formation Le Chocolat qui offre une vision complète de cette matière complexe, ou nous contacter.

Sources :

Dahlenborg, H. (2014) Fat bloom chocolate confectionery systems – From core to surface, Doctoral thesis (compilation), Lund University.

Sato et al. (2021), Fat bloom caused by partial de-oiling on chocolate surfaces after high-temperature exposure, Journal of the American Oil Chemists’ Society, 98(3), pp. 269-280.

Ziegleder, G. (2012), Fat bloom due to migration – theoretical and practical aspects, The Fraunhofer IVV, Germany, 6 december.